Vienne-Rome: le logement à prix abordable
Pavillon de l'Autriche
Avec l’exposition Agency for better living, le pavillon de l’Autriche se penche sur la crise européenne du logement. Les commissaires ont cherché des solutions dans l’histoire de Vienne et de Rome.
L’édition 2025 de la Biennale étant largement imprégnée de technosolutionnisme1, rares sont les exposants qui osent aborder l’architecture sous un angle politique et social. En traitant la question du logement, le pavillon de l’Autriche fait presque figure de résistant. Au travers de l’exposition Agency for better living, les commissaires Sabine Pollak, Michael Obrist et Lorenzo Romito questionnent la «crise du logement qui se propage à travers l’Europe», due notamment à la disparition des «loyers abordables». Leur proposition porte un double regard sur les villes de Vienne et de Rome, où les politiques en matière de logement se sont exprimées de manière radicalement différente.
Aidés par la symétrie en plan du pavillon autrichien, conçu en 1934 par Josef Hoffmann, les commissaires ont opté pour un traitement en miroir des deux villes. Une première moitié du bâtiment est consacrée à Vienne, ville modèle et précurseuse en matière de logement social avec la Vienne Rouge (1919-1934), et qui fournit aujourd’hui encore des efforts continus dans la production de logements abordables, en combattant notamment la spéculation foncière. Au travers de neuf étapes, agrémentées de films, de photographies et de textes, les visiteurs et visiteuses découvrent des projets viennois exemplaires, comme celui de Sargfabrik, où une ancienne usine de cercueils a été convertie en logements autogérés. Les commissaires affirment que Vienne est une caring city, une ville qui prend soin de ses habitants et qui, dans un mouvement qui va du haut vers le bas, s’assure que ses citoyens puissent se loger à des prix décents.
À Rome, sujet de la deuxième moitié du pavillon, la création de logements suivrait une logique presque inverse: dans un mouvement de bas en haut, les projets romains investissent bien souvent les ruines issues des échecs en matière de planification urbaine, et participent à la création de logements informels. Les projets présentés dans cette salle témoignent de la résistance de la société civile romaine face à la crise immobilière, et de la capacité de celle-ci à s’autogérer. Affichée au mur, une grande carte de la ville de Rome recense 100 bâtiments ou sites laissés en ruine, qui ont depuis été occupés, renaturalisés, ou qui cherchent encore un nouvel usage.
Par la comparaison de ces deux modèles top down et bottom up, les commissaires entendent mettre à disposition un large éventail de solutions pour la production future de logements en Europe. Optimistes, ils imaginent un système composite qui, en prenant le meilleur des méthodes viennoise et romaine, impliquerait autant les planificateurs institutionnels que les futurs habitants. Il ne faudra toutefois pas négliger l’importance des premiers quand il s’agira de créer un nombre important de logements de qualité. Espérer sortir de la crise européenne du logement sans politique publique cohérente s’apparente à une utopie (ou à une dystopie).
notes1. À propos du technosolutionnisme ambiant de la Biennale de Venise 2025, voir: Stéphanie Sonnette, «Biennale de Venise 2025: Ratti-ficial», espazium.ch, 21.05.2025